L'incendie de 1871

A ces fêtes, à ces jours d'allégresse, succédèrent de douloureux événements, dont le musée subit la cruelle atteinte. Après la guerre désastreuse de 1870, après le traité de 1871, Nancy, soumis au joug de l'occupation, devait longtemps encore rester le gage de la rançon stipulée pour prix de la paix. Pendant la fatale nuit du 17 au 18 juillet 1871, se manifeste dans l'étage supérieur de la caserne de gendarmerie un effroyable incendie dont la cause est restée un mystère. Maîtresses de la place, les autorités allemandes avaient interdit de la manière la plus absolue tout usage du tocsin, tout signal d'alarme. Privés des secours des pompiers et de leur matériel de sauvetage, les habitants du quartier font des efforts impuissants pour conjurer le fléau. L'abbé Guillaume, au risque de se faire emprisonner, agite la cloche de la chapelle Ducale mais déjà le feu a gagné les combles du musée et en quelques instants l'œuvre de ruine et de dévastation est consommée.

Permettez-moi de rappeler ici les termes mêmes dont se servait M. Lepage pour annoncer la terrible nouvelle dans le Journal d'archéologie. Rien ne saurait mieux peindre la douleur et le courage de notre cher président. Comme tous, il est cruellement frappé, mais loin de se laisser abattre, il veut ranimer l'activité de ses collègues.

« Un malheur affreux nous a frappés le Musée lorrain n'existe plus, la galerie des Cerfs est en ruines! Moins d'une heure a suffi aux flammes pour dévorer le fruit de tant de luttes, de peines, d'efforts persévérants. L'œuvre de plus de vingt années est à peu près complètement détruite !

Nous n'avons pas le courage d'énumérer nos pertes, elles sont immenses elles sont surtout irréparables, des trésors ne les feraient pas recouvrer.

Si épouvantable que soit ce désastre, doit-il nous faire renoncer à l'entreprise patriotique que le Comité, de concert avec la Société d'archéologie lorraine, a poursuivie jusqu'à ce jour avec une si infatigable énergie ? Non, nous saurons puiser des forces dans notre infortune même. Nos concitoyens, près desquels nous avons constamment trouvé un concours sympathique, ne refuseront pas de nous venir en aide ; les administrations publiques nous prêteront leur appui. »